Annie François : Mine de rien, autobobographie

jeudi 30 août 2012, par Élizabeth Legros Chapuis

Seuil, 2012

Voici un livre éprouvant, dont la lecture secoue, même si on sourit… et on sourit souvent, pourtant, devant l’humour ravageur que déploie Annie François. Quel courage et quelle élégance, cet humour ! Avec Mine de rien s’achève en effet la trilogie par laquelle elle a raconté sa vie avec les livres (Bouquiner, son « autobibliographie », qui était passionnant), avec le tabac (Clopin-Clopant) et enfin avec la souffrance. Ce dernier livre a d’ailleurs été interrompu par la mort de l’auteur, en juin 2009, après quinze années vécues en compagnie du cancer. Il se termine avec un texte de François Chaslin, le compagnon d’Annie François, évoquant ses derniers jours : "De guerre lasse".

Mine de rien n’est pas une méthode pour nous enseigner comment vivre avec la maladie, comment la vivre quand on la sait incurable. C’est juste l’histoire d’une femme pleine de vitalité qui raconte comment et pourquoi elle l’a vécue de cette manière qui est la sienne propre. Aucune complaisance dans ce récit d’une continuelle vivacité, écrit au présent, au présent de la souffrance. Annie François ne recule pas devant les détails sordides de la maladie vécue au quotidien, mais son humour toujours présent lui permet de les faire passer avec un sourire, « mine de rien ». Défile devant nous aussi toute une cohorte de médecins, compatissants ou expéditifs, avec leur jargon incompréhensible qui donne lieu à des dialogues savoureux. Annie François analyse aussi avec finesse les rapports difficiles du cancéreux avec son entourage.

Je ne me doutais pas à l’aborder que, sous la couverture joliment habillée de mauve de ce livre, se cachait un tel concentré de douleur, qui m’a explosé à la figure comme une mine – elle ne m’en voudrait pas, je pense, de ce mauvais jeu de mots. Impossible au lecteur de ne pas être profondément touché, bouleversé même, par ce que ce livre contient de plus irréductiblement humain.