Claire Martin : Dans un gant de fer

dimanche 18 août 2019, par Catherine Parent

Bibliothèque Québécoise

Considérée comme la première autobiographie féministe de la littérature québécoise, Dans un gant de fer de Claire Martin est successivement publiée au Cercle du livre de France en 1965 et 1966. Ce « diptyque » retrace l’enfance de l’autrice sous l’emprise d’un père violent ainsi que son éducation religieuse, il permet aussi de rendre compte de la société ultra-conformiste de l’entre-deux-guerres. Portés par une écriture narrative dépouillée et teinté d’ironie, les deux tomes de cette autobiographie – La joue droite (1965) et La joue gauche (1966) nous confient le récit d’une époque et, plus spécifiquement, de la condition féminine des années vingt au Québec.

Les souvenirs racontés par Claire Martin n’ont pour lendemains que la brutalité d’un père et l’atmosphère malveillante qu’instauraient les religieuses au pensionnat. Les scènes de violence familiale livrées par l’autrice dans leurs moindres détails dressent le portrait d’une société dans laquelle l’ordre patriarcal domine. Au carrefour de l’autobiographie, des mémoires et des souvenirs d’enfance, Dans un gant de fer rejette le traditionalisme religieux de l’époque et récrimine contre l’objectivation des femmes et les rôles traditionnels qui leur sont associées. Ainsi, la prise de parole sur cette histoire personnelle se double d’un ancrage historique tributaire du succès littéraire de l’œuvre, mais aussi des débats suscités par sa parution. Le récit engendrera à la fois un effet de scandale lors de sa publication et un mouvement de solidarité. En effet, Claire Martin trouve dans la réception critique de son œuvre une réponse à la question qu’elle pose au tout début du deuxième tome : « Mais il n’y en avait donc pas une seule, sur tout le lot, qui venait d’une famille comme la mienne ? » En réinvestissant son histoire singulière quarante ans plus tard, l’autrice couvre le destin d’une génération et participe à l’énonciation de l’expérience qu’ont vécue les Canadiennes-françaises. Dans un gant de fer possède ce que les écritures de l’intime ont de plus précieux : la capacité de rejoindre l’expérience universelle.

La joue gauche a remporté le Prix Québec-France et le Prix de la Province de Québec en 1966 tandis que La joue droite s’est vue gratifiée du prix du Gouverneur général en 1967.

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