Hélène Dorion : L’âme rentre à la maison

lundi 28 février 2011, par Roseline Combroux

La Différence, 2010

Hélène Dorion, poétesse québécoise, nous entraîne dans une méditation sur l’amour. La narratrice se retire sur une île, loin du continent, dans une solitude choisie elle entreprend de déterrer les racines de l’amour. « On avait pressenti que perdre l’amour serait la chose la plus douloureuse de sa vie, mais on ne pouvait imaginer une souffrance si vaste, si vive. »

En trente-deux chapitres de deux à trois pages nous refaisons le chemin depuis la découverte de l’amour « la vie devient alors une incessante célébration », à la plongée dans l’abîme quand il disparait « on croirait la mort venue… Tout, en quelques secondes, est devenu plat, s’est immobilisé, comme emprisonné dans la lave de la vie qui a éclaté » jusqu’au recommencement « mais tout à coup quelque chose nous secoue. On ouvre les yeux… L’appel de la vie est trop puissant, au-delà de la souffrance, au-delà du vide qui se déploie devant nous à perte de vue, on ne peut renoncer à ce monde ».

Écrit comme un long poème en prose son voyage intérieur décrit les subtils contretemps du sentiment amoureux et glorifie l’amitié « le feu de la transformation ne peut être traversé que dans la solitude. Mais si elle seule m’apprend à comprendre et à abandonner mes peurs, l’Ami-e surgit au moment où je voudrais relâcher et céder au vide, me tend la main, murmure quelques mots, pose sa tête sur l’oreiller froid… ne dit rien et cela suffit. » Avec la métaphore de l’île et les déchaînements imprévus de la nature nous plongeons dans l’effroi pour accueillir l’apaisement « aussi soudainement qu’il était venu, l’orage s’en est allé, laissant derrière lui un ciel épuré, une terre que la bataille a épuisée. La pluie froide n’a pas duré, mais pendant des heures elle a piétiné le sol, martelé les toits des maisons, creusé ici et là de lourds ruisseaux de boue. Dans le jardin, la vie est demeurée bien droite et n’a pas cédé devant tant de force. Les feuilles remuent légèrement, blessée mais vivantes. Jamais encore je n’avais senti une telle ivresse, un tel apaisement, comme si la peur qui nous étouffe dans l’étreinte des grands vent s’était transformée en émerveillement ému ».

La blessure se cicatrise, la possibilité d’un nouvel amour naît.

« Ne pas refuser la vie mais plutôt en choisir chaque mouvement. Ne pas renoncer à la quête de l’Autre, mais ne pas s’y pas perdre pour autant ».