Janine Massard : La petite monnaie des jours

jeudi 28 novembre 2013, par Martine Bousquet

Editions d’en bas, 2013

Après la table ronde organisée fin octobre 2013 par l’APA Toulouse et animée par Marie Hélène Roques : Romans, récits, représentations du travail en présence de Marie Didier ( Contre–visite), Hélène Duffau ( Lu, la madeleine de Nantes) et Janine Massard, je n’ai pu résister à acheter le roman autobiographique de cette dernière : La petite monnaie des jours Et je n’ai pas regretté, car comme le dit Gaston Cherpillot qui a préfacé son livre : « Janine voit clair et frappe juste... elle a plutôt la dent dure : je l’en félicite. »

Cette écrivaine suisse (vaudoise) née à Rolle en 1939 a reçu pour cet ouvrage le prix Schiller en 1986. Tour à tour éducatrice, vendeuse, téléphoniste, secrétaire, maîtresse d’école, elle se consacre à l’écriture depuis de nombreuses années. Son succès tient sans doute au fait qu’elle se fait la porte parole authentique de ceux qui ne s’expriment pas, ces mal nantis, ces honteux, ces obscurs d’une Suisse prospère souvent auto-satisfaite d’elle même.

Le roman est une chronique de la vie d’un village agricole du canton de Vaud dans les années 50 où les classes laborieuses commencent à voir se concrétiser le progrès. Le confort, la voiture ne sont plus des irréalités pour nantis. L’électroménager s’introduit dans les familles et transforme le rôle de la femme : de productrices, elles deviennent consommatrices. Tout au long du récit trois Parques sont là, et elles observent la vie s’agiter. Trois femmes qui surveillent par la fenêtre, enregistrent ce qui se déroule et commentent. Elles racontent leurs souvenirs aussi.

Il y a là une petite fille qui écoute et recueille le fil de leurs mots. Parfois elle questionne un peu pour démêler l’écheveau. A travers leurs yeux et leurs paroles, c’est une partie de la Suisse et de son passé qui revit. Ce livre raconte la vie de cette fillette, Jennifer, qui a aussi sa propre vision de la vie.

Progressivement, elle se construit, grandit et mûrit. Elle observe les difficultés de sa famille, le travail difficile de sa mère et de son père pour les nourrir. Elle apporte aussi sa part de travail. Puis elle réussit à aller au collège et sortir de son milieu. Devenant transfuge elle déclenchera l’ire des Parques, gardiennes du temps et des traditions.

C’est d’une écriture simple, imagée, vivante, parfois sévère et critique mais touchante que sont abordés sans drame les thèmes de la politique, des guerres, de la France, de la vie des hommes et des femmes, de leur misère de laissés-pour-compte.

Le livre qui vient d’être réédité en 2013 ne peut s’acheter qu’en Suisse ou sur Internet. Il est suivi d’un court récit lié à un événement du roman, un mémoire d’Eugène Kaupert : L’exécution de Jacob Lausseret né à Rolle en 1846 et de quelques réflexion sur la peine de mort.

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