Lydie Violet (et Marie Desplechin) : La vie sauve

mercredi 5 septembre 2007, par Véronique Montémont

Seuil, 2005

« J’ai des trucs à dire, ai-je remarqué. Et qui intéresseraient les gens. Il faut qu’ils sachent. Il faut leur dire comment cela se passe ». Je, c’est Lydie Violet, attachée de presse, quarante ans, atteinte d’une forme rare de tumeur au cerveau, qui lui laisse huit années d’espérance de vie. Marie Desplechin, l’écrivain rencontrée un soir, lui propose alors de faire un livre. Pas un livre d’entretiens. « Un livre autobiographique, ensemble ».

Il n’y aura donc qu’un seul je pour le dire, deux voix confondues dans une solidarité profonde en l’attachement à la vie, malgré ses coups bas. Lydie Violet traverse la maladie non pas comme une horreur ou un effroi, mais comme une expérience : elle parle, un peu, des symptômes, de la douleur, de la réalité organique du monstre qui pousse dans sa tête. Mais surtout, elle raconte ce qui se passe lorsque la vie bascule, au propre comme au figuré, et que l’on est propulsé derrière la paroi invisible, mais féroce, qui sépare le monde des malades et celui des bien portants. Une frontière qui a ses cruautés (les administrations sourdes, les chemises de nuit en papier de l’hôpital quand il fait froid, le corps médical si obstiné à soigner) mais qui révèle aussi quelques consolations inattendues : les lettres, les amis que l’on croyait frivoles et qui deviennent fidèles, un temps soudain devenu sans prix. Il faut en faire bon usage, l’appréhender avec une discipline nouvelle, apprendre la coexistence avec cette tête qui n’en fait qu’à sa tête. Ironiser un peu, aussi, pour supporter le tout. Marie Desplechin a apporté à ce récit son humour tranchant, souvent sarcastique.

Le livre, si justement intitulé La vie sauve , n’est pas un hymne au courage, pas un journal nosographique. Il dit simplement ce qui advient de l’existence, des espoirs et des désirs d’un être plongé un peu trop vite dans la conscience de sa finitude. Mais résolu à vivre tout ce que lui réserve son « éternité à durée déterminée ».