Michel Del Castillo : L’adieu au siècle, journal de l’année 1999

lundi 23 septembre 2013, par Françoise Appert

Seuil, 2000

J’ai lu, il y a juste un an, De père français, du même Michel del Castillo. Cet Adieu au siècle me touche plus encore.

D’abord il dévoile une belle personnalité. En 1999, M. del Castillo avait 66 ans, âge des retours sur son passé. Il le fait avec noblesse. Pour la première fois, il réussit à livrer ce que fut sa vie. L’écriture a été plus qu’une bouée de sauvetage, elle lui a dicté une conduite à tenir dans la vie. Ses personnages le représentent dans les mille et une facettes qu’il est capable de faire briller.

Michel del Castillo est en effet doué pour tout : mélomane, amateur éclairé en peinture, en sculpture. Sa spécialité évidemment reste la littérature. Plus de vingt titres figurent en fin de cet ouvrage.

Ce journal d’une année représente un bilan personnel autant qu’un tour d’horizon des cultures venues d’ailleurs. Certes, ce siècle passé a vu deux guerres mondiales, l’éclosion puis la chute du communisme soviétique, l’émergence en Europe du fascisme, ensuite le capitalisme nord-américain est érigé en monopole et la mondialisation est maintenant là…

Ce constat s’étale à travers les conflits majeurs (Kosovo, Afghanistan, Tchétchénie…). M. del Castillo se situe invariablement sur des positions de retrait : ce sont toujours les peuples et non les puissants qui l’intéressent. Tout en étant pétri de principes, M. del Castillo refuse les généralisations et les théories trop réductrices.
C’est l’humain qui l’intéresse. Son journal passe du quotidien à la réflexion. Ses lectures sont innombrables : Dostoïevski, Chateaubriand et nombre d’écrivains contemporains. La palette est très large mais ses sympathies transparaissent sans détours, alors que ses incompatibilités restent plus discrètes. Car M. del Castillo est, avant même d’être écrivain, un lecteur boulimique, tandis qu’en 1999, en marge de son journal, il préparait un ouvrage sur Colette.

Ce livre élève le lecteur. Il nous amène à réfléchir à partir de l’expérience si singulière de son auteur à ce qui a conduit nos choix de vie. Boris Cyrulnik a réussi à sauver sa vie par les mots. Il semble que Michel del Castillo ait, lui, construit sa vie sur l’art d’agencer les mots pour exprimer l’essentiel. Justesse du jugement, précision des descriptions, finesse des sentiments, tout s’accorde, dans ses multiples écrits pour le situer parmi les plus grands de la littérature. La postérité en jugera…
Moi, je suis plus que jamais séduite !