Michelle Obama : Devenir

jeudi 21 mars 2019, par Elisabeth Gillet-Perrot

Fayard, 2018

J’avais spécialement aimé le petit livre de Barack et Michelle Obama : Le pouvoir de l’espoir, discours de fin de mandat (Janvier 2017) et j’ai donc eu très envie de me plonger dans Devenir, l’autobiographie de Michelle, une « First Lady » si attachante qu’on aimerait la connaître personnellement.

Elle commence à rédiger son livre lorsqu’elle quitte La Maison Blanche, la laissant aux mains de Donald Trump pour lequel elle ne cache pas qu’elle a d’autant moins d’estime qu’il a cherché sans vergogne à les déstabiliser. Du jour au lendemain ou presque, elle se retrouve à gérer sa vie, ses filles étant devenues indépendantes. Quelle étrange impression de ne plus avoir des gardes du corps au courant de tous ses mouvements !

Dès les premières pages qui relatent son enfance, on se trouve de plain-pied dans les valeurs morales de sa parentèle : « Dans ma famille, nous avons la solide habitude de refouler les mauvaises nouvelles ou d’essayer de les oublier, presque dès l’instant où elles arrivent ». Mais c’est toujours sans amertume et sans désir de vengeance qu’elle souligne à quel point il est difficile d’être noire aux USA : une de ses colocataires disparaît un jour sans qu’elle sache pourquoi, elle apprendra par la suite que la mère de cette étudiante ne supportait pas que sa fille soit obligée de côtoyer une noire !

Cependant les souvenirs qu’elle évoque sont ceux d’une enfance heureuse malgré la sclérose en plaque qui va emporter son père dont elle dit qu’elle ne l’a jamais entendu se plaindre. Elle tient sans doute sa force de caractère de la confiance que leurs parents avaient en elle et en son frère Craig : « Mon père et ma mère nous faisaient des recommandations plus qu’ils ne nous fixaient des règles ». Elle rend bien aussi l’atmosphère glaciale des hivers à Chicago où elle vivait alors : « vous pouvez passer cent journées d’affilée sous un ciel gris acier posé sur la ville comme un couvercle ».

Sa rencontre avec Barack est l’acmé de leur histoire. Dans le cadre professionnel, où il est son assistant, Michelle comprend vite les qualités exceptionnelles de celui qui va devenir son époux. En racontant l’évolution de leur vie de couple elle ne fait montre d’aucune fausse pudeur : elle décrit tranquillement comment ils ont fait appel à un conseiller conjugal pour éviter les conflits dans leur vie avec deux carrières importantes et avec deux caractères très différents, elle très organisée, lui plus spontané et fantaisiste du fait de son éducation. Elle ne cache pas qu’ils ont dû avoir recours à des fécondations in vitro pour avoir leurs deux filles. Et elle explique comment plus tard, elle s’est organisée pour pouvoir mener de front sa vie d’épouse d’un homme politique très occupé et sa vie de mère de famille. Elle refuse que ses filles croient que la vie commence quand l’homme rentre à la maison ! Et Michelle fait savoir qu’elles n’attendront pas « Papa », à lui d’adapter son emploi du temps pour les voir !!!!

Une fois installée à la Maison Blanche, elle met vite en pratique son grand projet : planter un jardin potager afin de donner l’exemple d’un autre type de comportement alimentaire en commençant par initier les enfants. Étudiante, elle avait été frappée par le nombre d’obèses et la mauvaise qualité des nourritures proposées aux enfants des écoles (trop gras, trop sucré). Elle raconte avec beaucoup d’humour comment elle a obtenu le soutien de Barack dans ce grand projet : Barack répond aux journalistes que s’il n’avait pas réussi à faire passer la loi pour lutter contre l’obésité, Michelle l’aurait envoyé « dormir sur le canapé » !

Au long de son récit, elle parcourt les deux mandats de Barack et donne beaucoup d’anecdotes variées allant de la première rencontre avec la Reine Elizabeth à Buckingham aux soutiens qu’elle a tenté d’apporter aux femmes de militaires et aux enfants des écoles. Elle souligne les problèmes que rencontre une « First Lady » puisqu’il n’y a pas de mode d’emploi pour le rôle mais qu’en revanche, beaucoup de gens sont prêts à critiquer le moindre faux pas. Et surtout, elle nous relate avec la finesse et la sensibilité qui lui sont propres les grands moments d’angoisse quand, par exemple Barack décide la capture d’Oussama Ben Laden et le soulagement qu’il ressent quand il sait qu’il a réussi.

Ajoutons qu’elle écrit très bien, comme au fil de la plume, résumant en quelques 400 pages, une large tranche de vie courant sur de nombreuses années.