Nicole Glorieux-Hostier : Les Glorieux, L’étonnante histoire d’une famille paysanne franc-comtoise pendant les trente glorieuses

mercredi 5 juin 2024, par Françoise Lott

éditions Bleu autour (travail collectif, à compte d’auteur)

C’est un beau livre. Voici ce qu’il raconte. Les huit enfants présents sur la photo en noir et blanc de la couverture n’ont jamais cessé de se réunir chaque année longuement. En 2022, ils font aboutir ce qui est un désir commun à tous : faire le récit de leurs années de jeunesse. Nicole va consulter ses frères et sœurs et va écrire ce qu’ensemble ils auront évoqué. En 125 pages, sur un papier glacé qui met en valeur les photos qui accompagnent le récit, on découvre « L’étonnante histoire d’une famille paysanne franc-comtoise pendant les trente glorieuses ». On découvre aussi l’enquête qui permettra de dévoiler un secret de famille portant sur la naissance de l’aînée.

Leur mère, Marguerite, est la dixième enfant d’une fratrie de seize. On saura plus tard qu’elle a eu une jeunesse mouvementée. Elle a trente ans quand elle épouse Robert Glorieux, qui a quarante - deux ans. Il est revenu en 1945 d’une captivité de cinq ans et a repris la ferme familiale dont il a hérité. 25 hectares d’une terre qui n’est pas riche sur un plateau qui domine la vallée du Doubs. Le couple va vivre en appliquant les valeurs chrétiennes, avec une foi profonde pour Marguerite, et tous deux avec générosité.

« L’argent manquait douloureusement », et c’était le souci constant de Marguerite. Tous travaillaient à la terre selon leur âge : à cinq ans, les enfants savent faner, un peu plus tard, ils peuvent buter les pommes de terre, dresser les gerbes en « maillettes », guider le cheval par la bride. Les fillettes font la lessive, remontent la brouette du lavoir, savent accomplir tous les travaux ménagers. La mère veille à ce que le travail soit bien fait et n’accepte pas qu’on puisse être fatigué. Elle-même n’a pour coudre que les heures de la nuit. Elle trouve cependant le temps de s’occuper de l’église et d’y prendre des responsabilités, de veiller à ce que tous soient à l’heure à la messe le dimanche ; elle fait respecter le carême, dirige la prière du soir. Les enfants se souviennent aussi d’avoir eu froid en hiver, dans des chambres qu’on ne chauffait pas, d’avoir été gênés d’hériter de vêtements déjà portés par d’autres.

Mais les parents trouvaient l’argent nécessaire aussi bien pour consulter un médecin quand la santé des enfants le voulait, que pour permettre à tous, par des voies différentes, d’obtenir une profession. Il y avait des obstacles, les bras des enfants étaient nécessaires au travail de la ferme. Même les jumeaux, rétifs à toute discipline, ont trouvé la voie qui leur a permis de devenir des chefs de cuisine estimés. Tous savaient qu’il fallait faire des études, tous sont reconnaissants à l’école de la République pour l’ascension sociale qu’elle leur a permis de vivre.

Leur reconnaissance va aussi à leurs parents : le caractère enjoué de Robert venait atténuer la sévérité inébranlable de Marguerite. Ils étaient fiers de la réussite scolaire de leurs enfants. Et soucieux de les voir respecter certains principes : aider les vieilles personnes du village, saluer les gens qu’on croisait dans la rue, donner l’hospitalité aux ouvriers de passage, quelle que soit leur origine. On découvre, au fil des pages, le secret de la naissance de Chantal, fruit d’une liaison mystérieuse de Marguerite.
Ce livre est un beau témoignage du dévouement d’un père et d’une mère dont les enfants étaient la seule richesse.