Rabindranath Tagore : Souvenirs d’enfance

vendredi 7 septembre 2012, par Catherine Vautier-Péanne

Gallimard, 2005

Rabindranath Tagore (1861-1941) est un grand poète indien, reconnu et récompensé en 1913 par le Prix Nobel de Littérature. Il s’investit dans l’indépendance de son pays, l’éducation, et produit une œuvre dont une grande partie traduite en français, (André Gide notamment traduit L’Offrande Lyrique ) est publiée chez Gallimard.

L’été de l’année précédant sa disparition, comme tous les ans il se réfugie sur les hauteurs de Darjeeling, accompagné de sa famille et de ses amis, pour fuir la chaleur torride de la saison de la mousson. C’est au cours de cet été 1940 que le grand poète convoque les souvenirs qui lui restent de son enfance, les dictant aux amis et assistants qui entourent le lit du vieux maître vénéré de tous. Il ne s’agit pas d’un récit chronologique mais d’une suite de moments qui l’ont marqué : ses échecs scolaires par exemple - essayant de tomber malade par tous les moyens pour ne pas aller à l’école, hélas il a une santé de fer - comble de l’ironie pour lui qui crée au début du XXe siècle une université à Santiniketan ; la vie à Calcutta, où il est né, qui a tellement changé depuis l’époque de son enfance ; les conflits familiaux dans une fratrie de quatorze enfants, mais aussi les plaisirs partagés avec ses frères ; sa découverte de la poésie, très utile pour impressionner les jeunes filles. Pour les lecteurs occidentaux, c’est l’arrière plan totalement exotique qui stimule notre curiosité, comme monter à dos d’éléphant ou écouter des extraits du Ramayana, la grande épopée indienne. Quelle fraîcheur dans l’évocation de ces souvenirs, malgré son grand âge !

« Les enfants de ce temps-là ne partageaient pas les plaisirs des grandes personnes, même de loin. Si nous avions assez d’audace pour nous approcher de nos aînés, nous étions vite remis à notre place : Sauvez-vous, allez jouer. Et s’il nous arrivait de faire le bruit exigé par nos jeux d’enfants, on nous disait : restez tranquilles. Les amusements et les bavardages des grandes personnes étaient-ils silencieux ? Loin de là. C’est pourquoi, de temps à autre, nous étions atteints à distance par leur joyeuse excitation, comme si nous recevions l’écume d’une chute d’eau ».